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Le damas ? / Qu'est ce que le damas ? / Propriétés mécaniques / Composites feuilletés

Aciers damassés soudés
et nouveau type de composites feuilletés

par J. WADSWORTH, DONG WHA KUM et O.D. SHERBY

Metal Progress. juin 1986. p. 61-67.

TRAITEMENT THERMIQUE - 205-86

Mise à jour 23 aout 2002

L'article présente d'abord quelques composites en métaux ferreux soudés à l'état solide, dits " aciers damassés ", ayant un intérêt historique. Les épées en aciers damassés étaient réputées pour leurs qualités.

On présente ensuite les résultats d'une étude récente sur les composites feuilletés comprenant des feuillets en acier à très haut carbone. (1 à 2,1 % C) soudés à l'état solide à des feuillets du même acier ou d'un autre. Ces composites offrent des analogies avec les aciers damassés. Ils sont très tenaces et superplastiques.

Les aciers à très haut carbone et les composites feuilletés contenant de tels aciers suscitent l'intérêt des chercheurs depuis maintenant quelques années [1,2]. Les aciers à très haut carbone, qui contiennent de 1 à 2,1 % de carbone, ont une importance commerciale potentielle du fait qu'ils sont superplastiques à des températures intermédiaires et résistants et ductiles à la température ambiante.

L'intérêt pour ces aciers résulte aussi de leur similitude notamment de composition, avec les aciers damassés [3, 4]. Les épées faites en aciers de Damas étaient réputées pour leur acuité et leur résistance, pour les légendes attachées à leur traitement thermique et pour les motifs inhabituels sur leurs surfaces appelés damas.

En dehors du procédé de fabrication des aciers de Damas, il existait d'autres méthodes qui donnaient aussi des motifs inhabituels à la surface des armes en acier. Ces méthodes comportaient en général un soudage à l'état solide de bandes en différents aciers ou fers. Ces bandes étaient ensuite forgées pour former une pièce. Le label " damassé soudé " pour ces produits en acier a été probablement inventé par le métallurgiste russe Chernov dans la période 1860 - 1880 [5]. Dans certains cas les produits soudés représentaient des tentatives pour copier les véritables aciers de Damas. Dans d'autres cas, les techniques avaient été établies indépendamment. Dans tous les cas, ces produits soudés à l'état solide ne doivent pas être confondus avec les vrais aciers de Damas, qui étaient forgés à partir d'une pièce moulée unique en employant un procédé spécial qui ne comportait pas de soudage à l'état solide. Les motifs à la surface de ces deux types de produits d'acier ont des origines métallurgiques et des apparences très différentes.

Une recherche récente sur les aciers à très haut carbone a porté sur la fabrication et le comportement mécanique de composites feuilletés soudés à l'état solide constitués d'aciers à très haut carbone et d'autres produits à base de fer tels que le fer pur ou l'acier à bas carbone. Dans cet article on passe en revue des composites ferreux soudés à l'état solide ayant un intérêt historique et on résume les résultats d'un travail récent sur des composites feuilletés en acier à très haut carbone.

Exemples anciens: lame d'herminette, lame mérovingienne et kris

Nous savons que l'assemblage à l'état solide de deux matériaux ferreux différents était pratiqué à une époque aussi ancienne que le premier millénaire avant J.C. [6]. Le produit soudé consistait souvent en un mélange d'un acier avec un fer. Un ancien exemple d'acier à moyen carbone soudé à un fer à bas carbone est celui d'une lame d'herminette fabriquée par des artisans grecs aux environs de 400 avant J.C. (fig. 1). Elle comporte une arête tranchante en acier à moyen carbone soutenu par un fer à bas carbone [6].

Les aciers employés dans les anciens composites laminés pouvaient avoir des teneurs en carbone très variées, allant de bas à haut et même très haut carbone. Les fers étaient généralement forgés (à très bas carbone).

En plus de la lame d'herminette (d'Asie Mineure), on connaît d'autres produits composites fabriqués par soudage à l'état solide dont une lame mérovin-gienne (Europe ancienne), un kris (Indonésie) et l'épée japonaise.

Herminette

Fig. 1. - La microstructure d'une lame d'herminette fabriquée vers 400 avant J.C. par des artisans grecs révèle son arête tranchante en acier à moyen carbone et sa pièce d'appui en fer à bas carbone.

Soudage par forgeage. - Bien que la lame mérovingienne soudée selon des motifs (fig. 2) porte le nom de la première dynastie franque (500 - 751 après J.C.), on estime que sa technique date à peu près de la fin du deuxième siècle. (Les objets en fer fabriqués avant cette date sont souvent trop fortement corrodés pour qu'on puisse effectuer un examen métallurgique de leurs surfaces). D'après Cyril Stanley Smith, les lames mérovingiennes étaient fabriquées principalement près du Rhin mais ont été largement répandues par le commerce et les guerres [7].xx Ces lames étaient faites en empilant des bandes alternées de fer pur et de fer cémenté, puis en les martelant ou les forgeant ensemble selon une technique comportant des pliages et des torsions. L'arête tranchante était en acier à haut carbone. Les motifs dus aux couches différentes étaient rendus visibles par un meulage et une attaque chimique de la surface

Lame mérovingienne

Fig. 2. - Cette lame mérovingienne soudée selon des motifs a été découverte dans une tombe Viking au sud de la Finlande. Elle a été probablement fabriquée au bord du Rhin vers 650 - 700 après J.C.

Kris. - Les indonésiens fabriquent un type de couteau connu sous le nom de kris (fig. 3) qui a été décrit à la fois par Cyril Stanley Smith [7] (qui donne d'excellents exemples des motifs de leurs surfaces) et par l'ancien métallurgiste Walter Rosenhain [8] (qui décrit la fabrication d'un kris relativement moderne). Smith dit que les premières de ces lames ont été faites aux environs de 1379 après J.C. Le kris moderne de Rosenhain a été fabriqué par soudage à l'état solide d'un acier à outil " un acier à haut carbone tel qu'on en emploie couramment pour les outils et en coutellerie " à des couches soudées de fer forgé. En outre il explique que " l'imperfection des soudures [à l'état solide] entre les [couches] de fer forgé joue aussi un rôle important dans la formation du motif damassé ". L'importance de cette observation sera expliquée plus loin.

kris indonésien

Fig. 3. - Le premier kris indonésien a été fait probablement au 14e siècle. On peut en façonner un en soudant à l'état solide un acier à outil à des couches soudées entre elles de fer forgé.

Le produit soudé le plus fameux porte le label " made in Japan "

Le produit soudé à l'état solide le plus fameux est probablement l'épée japonaise [7,9]. Dans ce cas une lame en acier a très haut carbone (appelé uagane) a été jointe par forgeage à un fer doux à bas carbone. Bien que la température spécifique de forgeage ne soit pas connue, nous pensons qu'elle était de 1000 - 1100°C. A ces températures une liaison s'établit facilement du fait de la diffusion rapide du fer et de l'interdiffusion du carbone passant de l'acier à haut carbone au fer à bas carbone. A ces températures aussi les métaux sont très doux et ductiles et leurs pellicules d'oxydes se brisent facilement.

Après la liaison, une certaine méthode de formage du composite à deux couches a donné une lame comprenant une couche d'acier à très haut carbone sur toute sa surface, enveloppant complètement le cœur en fer doux. La lame a été ensuite traitée thermiquement. Le composite a été enchâssé dans de l'argile, celle-ci ayant seulement une faible épaisseur sur l'arête de la lame où l'on désirait avoir la dureté maximale. Le traitement thermique a été effectué probablement à environ 50° C au-dessus de Ac1, (727° C dans les aciers au carbone). Cette température relativement basse réduit l'interdiffusion du carbone dans le cœur en fer doux et donne aussi la dureté maximale possible de l'arête à haut carbone de la lame après la trempe.

Le motif visible sur la surface d'acier à très haut carbone de l'épée japonaise provient des différentes réponses à l'attaque des produits de transformation obtenus par la trempe depuis une température supérieure à A1 - de la martensite-bainite sur l'arête de la lame et une structure de perlite ensuite. Le cœur en fer forgé de l'épée n'est naturellement pas affecté par ce traitement thermique. (Disons en passant qu'il est parfois possible d'observer de véritables motifs d'acier de Damas sur une lame d'épée japonaise comme résultat de sa haute teneur en carbone et de l'histoire de son traitement).

Acier de l'épée. - Le uagane de l'épée japonaise est un acier à très haut carbone (typiquement 1,3 % C) forgé à partir d'un tama-hagane, produit de réduction fabriqué à partir de minerai de fer, de sable et de charbon de bois. Le tama-hagane contenait environ 1,9 % C, niveau trop élevé pour des caractéristiques mécaniques optimales. Il était pour cette raison forgé, replié sur lui-même et soudé à l'état solide par un nouveau forgeage. Ce procédé était répété plus de 15 fois jusqu'à obtenir la forme voulue.

Deux conceptions erronées sont répandues en ce qui concerne la procédure des pliages multiples. L'une est que les pliages répétés produisent des milliers de couches distinctes et alternées à bas et haut carbone, qui seraient responsables des excellentes caractéristiques mécaniques de l'acier. La seconde est que le pliage multiple donne une structure de soudures en motifs. Ces deux conceptions sont erronées.

En réalité, le pliage multiple était fait principalement pour réduire la teneur en carbone de 1,9 % de l'acier tama-hagane initial. Un martelage et un pliage à environ 1000° C, correspondant à un métal orange vif, abaissent la teneur en carbone de la surface fraîchement exposée à l'air par décarburation (le carbone se combine avec l'oxygène pour donner du monoxyde de carbone). Un bénéfice additionnel est l'homogénéisation du carbone dans l'acier. Quinze pliages, qui représentent 15 000 couches d'acier exposées à l'air, donnent une épaisseur de couche individuelle de 0,2 µm pour une épée typique de 6 mm d'épaisseur.

La produit final est un acier uagane ayant d'excellentes caractéristiques mécaniques parce que sa teneur en carbone est à la fois relativement basse (environ 1,3 %) et uniformément répartie dans une matrice à grain fin. On n'obtient pas de structure soudée donnant des motifs visibles, non seulement parce que les couches individuelles de 2 µm d'épaisseur ne sont pas résolubles à l'œil nu, mais aussi parce que toutes les couches ont la même teneur en carbone (les atomes de carbone traversent une distance de 1,4 µm en 30 s à 1000° C).

Dix-neuvième siècle: naissance de l'acier damassé soudé

Historiquement la technique de production de l'acier de Damas soudé est très récente. Elle comporte essentiellement le soudage d'un acier à un fer en bandes en vue de procurer la résistance et la structure adéquates à des canons de fusil et à des lames d'épée. C Smith [7] place son origine en Extrême-orient au 16e siècle ; au 18e siècle elle était pratiquée en Europe.

Un canon de fusil damassé soudé comprenait sept couches: quatre de matériau à bas carbone ou de fer pur, trois d'acier. Ces couches étaient d'abord forgées ensemble en une bande, qui était ensuite bobinée pour obtenir la forme cylindrique désirée. Dans une variante plus complexe de la technique, plusieurs bandes soudées étaient tordues et ensuite ressoudées et reforgées de façon à obtenir finalement des motifs compliqués. Un exemple en est l'épée soudée chinoise de la figure 4. Comme on l'a vu plus haut, certaines épées (mais pas toutes) faites de cette manière représentaient des tentatives pour copier les véritables aciers de Damas.

Dans le district russe de l'Oural, aux 16e et 17e siècles, les lames damassées soudées étaient faites en joignant ensemble des bandes de fer cémentées et non cémentées par forgeage au marteau, puis en les pliant et en les ressoudant. Les bandes en fer cémenté à très haut carbone étaient appelées "acier bulat"; le produit soudé à l'état solide était le "bulat soudé".

L'intérêt pour l'acier damassé soudé a atteint son maximum en France au début du 19e siècle [7]. La technique était alors si développée que, par exemple, une inscription " écrite " sur un acier pouvait être incorporée à une lame d'épée, ou un canon de fusil composites (fig. 5).

Quelle que soit la technique spécifique utilisée, tous les composites feuilletés soudés à l'état solide étaient soudés puis forgés à une température suffisamment basse pour éviter une diffusion excessive. Les deux matériaux différents constituant le composite étaient en général un acier à bas carbone ou un fer forgé et un acier à très haut carbone; l'épée japonaise en est un bon exemple. Mais des aciers damassés soudés étaient aussi faits en aciers à bas et à haut carbone. Dans certains cas les soudures à l'état solide étaient faites entre un fer forgé et un acier à bas ou moyen carbone; les lames mérovingiennes et la lame d'herminette en sont des exemples.

épée chinoise

Fig. 4. - Epée chinoise du 17e siècle représentant un exemple de la technique de fabrication des épées damassées soudées. La résistance et la structure voulues étaient obtenues en soudant ensemble des bandes d'acier et de fer

canon de fusil

Fig. 5. - Canon de fusil damassé soudé portant les mots " Zenobe Gramme " incorporés dans le motif. Ce stade avancé de développement a été atteint au 19e siècle.

Composites feuilletés en acier à très haut carbone super tenaces et superplastiques

Notre étude à Stanford a révélé que les aciers à grain fin à très haut carbone peuvent être facilement soudés à l'état solide soit entre eux, soit à d'autres métaux ferreux. En fait, les structures ultra fines permettent la liaison à des températures intérieures à A1. Nous croyons que ceci est rendu possible par le grand nombre de joints de grains : ils favorisent la liaison aux interfaces en accélérant la diffusion.

L'aptitude à lier ces aciers à eux-mêmes ou à d'autres métaux ferreux à une température inférieure à A1 est une propriété clé des aciers à très haut carbone pour plusieurs raisons:
1. - Une basse température de liaison signifie que les composites ferreux feuilletés peuvent être fabriqués sans détruire la structure ultra fine des aciers à très haut carbone.
2. - Dans l'élaboration des aciers à très haut carbone par la métallurgie des poudres, des poudres solidifiées rapidement et ayant des structures fines peuvent être compactées à des températures intermédiaires, conservant ainsi cette structure fine dans la pièce frittée.
3. - Les composites feuilletés en acier à très haut carbone peuvent être traités thermiquement sélectivement: une trempe depuis une température juste supérieure à A1 crée un composite comprenant des couches alternées de martensite ultra dure et de fer doux.
4. - Les composites feuilletés peuvent posséder des propriétés superplastiques.xx La discussion qui suit donne les résultats du travail effectué à Stanford sur des composites ferreux feuilletés.

Ténacité. - Un domaine d'intérêt actuel est celui des propriétés de résilience de ces matériaux. On notera que les composites feuilletés en aciers à très haut carbone sont assez semblables aux objets anciens soudés à l'état solide. Ce matériau damassé soudé moderne est constitué de couches alternées d'acier à très haut carbone (1,0 % C) et d'acier AISI 1020, liées ensemble à l'état solide à une basse température de 650° C par laminage. On a fabriqué des composites formés de douze couches (six couches de chaque acier).

Les composites ont été testés à l'état brut de laminage (sans traitement thermique). L'orientation favorable à l'arrêt de la propagation des fissures a été le principal sujet étudié. Des liaisons excellentes ont été obtenues du point de vue microstructure et les résultats d'essais de flexion simple prouvent une très bonne intégrité des liaisons (fig. 6). La liaison n'est pourtant pas parfaite, ce qui est avantageux pour certaines propriétés de résilience.

Des énergies de rupture élevées lors d'essais de résilience ont été obtenues avec ces composites feuilletés, plus élevées que celles de leurs constituants (fig. 7). On notera aussi la très basse température de transition 140°C. de ce composite feuilleté.xx La résilience élevée du composite est liée au fait que, sous l'effet de délaminations aux interfaces des couches, les pointes des fissures s'émoussent. On peut voir une telle délamination dans l'éprouvette de résilience brisée du composite (fig. 7). Ainsi la résilience élevée est due aux liaisons bonnes (mais non parfaites) entre les feuillets. Une augmentation de la résistance de la liaison au moyen d'un traitement thermique, par exemple, entraîne une diminution de l'énergie de rupture de résilience [2].

Des études similaires sont actuellement en cours avec pour objectif d'élever la résistance à la fatigue de l'acier à très haut carbone par un feuilletage. L'objectif est ici d'émousser la pointe des fissures de fatigue à l'aide d'une délamination des interfaces ce qui allonge la durée de vie en fatigue.

Ces observations peuvent aider à expliquer le comportement au choc des pièces damassées soudées ayant un intérêt historique. Les soudures à l'état solide dans ces matériaux n'était pas parfaites elles non plus; beaucoup contenaient des particules d'oxydes et de laitier. Si de tels plans affaiblis se trouvaient dans l'orientation favorable à l'arrêt des fissures, il pouvait en résulter des propriétés de résilience améliorées. D'autre part, si la soudure était soumise à une forte contrainte de traction et si c'était une soudure traversante, comme dans le cas des soudures finales des canons le fusils damassés européens, le résultat pouvait être catastrophique. Par exemple. on considère maintenant qu'il est dangereux de faire feu avec ces armes, en particulier si l'on utilise les poudres actuelles denses et à combustion progressive qui développent le fortes pressions dans la culasse [10].

Superplasticité. - Les résultats d'une autre étude de composites feuilletés modernes à acier à très haut carbone ont révélé qu'un composite comportant des constituants superplastiques et non superplastiques présentait un comportement superplastique. Un acier à bas carbone ou un acier inoxydable, ni l'un ni l'autre superplastiques, peuvent, une fois feuilletés avec un acier à très haut carbone, présenter des allongements à la rupture de plus de 800 % [1]. Ainsi cet ancien fabricant d'acier damassé soudé à pu être l'heureux bénéficiaire d'un système de composite qui était à la fais extrêmement indulgent et facile à forger.

 

Encore des recherches et développement. - Notre étude de l'art ancien de la fabrication des composites ferreux feuilletés n'a pas amené de couvertes précises concernant les températures de liaison, les techniques de préparation des surfaces ni des procédures de traitement thermique. En outre, les étapes réellement suivies dans la fabrication des métaux constituant un composite feuilleté n'ont jamais été décrites. L'importance possible de l'épaisseur des couches intermédiaires et la documentation les concernant n'étaient apparemment pas un objet d'intérêt. L'épaisseur était dictée par l'esthétique des motifs obtenus à la surface des pièces ou par l'optimisation des caractéristiques mécaniques.

Nous n'avons pas pu découvrir de preuve qu'une liaison à l'état solide ait jamais été réalisée à des températures intérieures à A1. Il est néanmoins probable que la liaison était faite à des températures relativement basses inférieures à 1000° C, où la diffusion du carbone dans l'austénite est ralentie. Un traitement thermique sélectif est un autre facteur important et dans lequel la température et le milieu de trempe jouent des rôles clés. Le temps de maintien à température est aussi critique car il dicte la quantité d'interdiffusion et par conséquent le type et la qualité des produits de transformation.

De telles considérations forment la base des futures recherches sur les composites feuilletés ferreux. L'objectif essentiel sera d'obtenir des caractéristiques mécaniques spécifiques pour ces matériaux.

éprouvette

Fig. 6. - En haut: orientation des éprouvettes prélevées dans un composite feuilleté en acier à très haut carbone et en acier 1020. Au centre: interface entre l'acier à très haut carbone (en haut) et l'acier 1020. En bas: éprouvette de flexion. Cette technique produit des liaisons ayant une grande intégrité métallurgique.

résilience

Fig. 7. - Propriétés de résilience Charpy sur éprouvette entaillée en V d'un composite feuilleté, en fonction de ses constituants métalliques. Le composite est bon mais des liaisons imparfaites sont avantageuses.

Une version moderne d'un acier d'épée japonaise

japon 1

Fig. du haut. - Photomicrographies au microscope optique d'un composite feuilleté en acier à très haut carbone et alliage Fe - 3 % Si après trois étapes de sa fabrication pour (de gauche à droite) 25, 250 et 2500 couches individuelles. La technique utilisée comportait une liaison par laminage à une température relativement basse.

japon 2

Fig. du bas. - Photomicrographies au microscope électronique à balayage du composite à 2500 couches traité de façon à avoir des épaisseurs de couches individuelles de (de gauche à droite) 5, 2 et 1 µm. On notera la répartition homogène des carbures dans l'échantillon à couches de 1 µm.

Nous avons simulé le procédé des pliages multiples servant à la fabrication de l'acier uagane, en employant une méthode qui optimise le maintien d'une microstructure feuilletée. Cette technique rigoureuse consiste à lier entre elles par laminage des couches alternées d'un acier à très haut carbone et d'un alliage Fe - 3 % Si à la température relativement basse de 700°C. Le composite feuilleté ainsi obtenu est découpé en plusieurs sections, ces sections sont empilées, puis l'empilage est laminé. Cette procédure est répétée jusqu'à ce qu'on obtienne l'épaisseur voulue du composite feuilleté. Les micrographies optiques (grossissement 100) montrent le composite feuilleté après trois étapes de sa fabrication: 25, 250 et 2500 couches.

La photomicrographie au microscope électronique à balayage à gauche est celle du composite feuilleté à 2500 couches et révélé une épaisseur individuelle de couche de 5 µm. La séparation des deux constituants est très nette malgré la forte déformation thermomécanique. Ceci n'a été possible qu'en raison des conditions spéciales de la fabrication et des compositions de couches choisies. D'abord, le choix d'une température de travail inférieure au point A1 de l'acier à très haut carbone - 727° C, n'occasionne aucune dissolution des carbures. Ensuite, le silicium de l'alliage Fe - 3 % Si empêche la diffusion du carbone dans celui-ci en provenance de l'acier à très haut carbone. Les deux autres micrographies au microscope électronique à balayage montrent ce qu'il arrive lorsque ce composite feuilleté à 2500 couches est ensuite laminé à 700°C. Quand une épaisseur de couche de moins de 1 µm est obtenue (à droite), le composite révèle une répartition homogène des carbures avec une grosseur de grain égale à plusieurs fois l'épaisseur des feuillets. Ceci corrobore notre affirmation selon laquelle un pliage multiple du genre de celui utilisé pour fabriquer l'acier uagane des épées japonaises donne une microstructure homogène. Egalement, la haute température lors du pliage, au moins 1000° C, et l'absence d'inhibiteur de diffusion (de silicium par exemple) ajouté durant la fabrication produisent des structures homogènes beaucoup plus aisément que dans notre exemple moderne.

Composition nominale de l'acier cité dans l'article
AISI 1020 : C 0,17 - 0,23 %, Mn 0,30 - 0,60 %

BIBLIOGRAPHIE

[1] " Acier à très haut carbone ", par O.D. Sherby, T. Olyama, D.W. Kum, S. Waiser et J. Wadsworth; Journal of Metals, vol. 11, n° 6, 1985, p.50-56.

[2] " Propriétés de résilience de composites feuilletés contenant des aciers à très haut carbone ", par 0. W. Kum, T. Oyama, J. Wadsworth et O.D. Sherby, Journal of Mechanics and Physics of Solids, vol. 31, n° 2, 1983, p. 173-186.

[3] " Sur la bulat - les aciers damassés réexaminés ", par J. Wadsworth et 0.D. Sherby ; Progress in Materials Science, vol. 25, n° 1, 1980, p. 35-68.

[4] " Aciers damassés ", par 0.D. Sherby et J. Wadsworth; Scientific American, vol. 252, n° 2, 1985, p. 112-120.

[5] " 0. K. Chernov and the Science of Métal ", par N.T. Gudrsov, (Ed.): Leningrad, 1950.

[6] " Comment l'âge du fer a commencé ", par R. Maddin, J.D. Muhly et T.S. Wheeler: Scientitic American, vol. 237, n° 2, 1977, p. 122-131.

[7] " A history of Metallography ", par C.S. Smith: University of Chicago Press, 1960.

[8] " Notes sur un travail du métal malais ", par W. Rosenhain: Journal of the Anthropological Society, vol. 31, 1901, p. 161-166.

[9] " Nippon-to, une introduction aux vieilles épées du Japon ", par E.C. Sain: Journal of the iron and Steel Institute, vol. 200, n° 2, 1962, P. 265-282.

[10] W. Labisky : Shooting Times. Janvier 1967 ; p 36-36

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