Le
doigt dans l'engrenage
Tout
a commencé en 1988 en découvrant par hasard le premier
numéro de " la Passion des Couteaux". Ma curiosité
a été attirée par quelques photographies
de couteaux aux lames mystérieuses avec des dessins étranges.
Les lames semblant bien réelles, les mystères devaient
pouvoir s'expliquer...
Ne
trouvant pas de livres en français sur la fabrication de
l'acier damas j'allais abandonner quand au cours d'un voyage aux
Etats Unis les magasines "Blades" et "Knives"
ont relancé ma curiosité en me permettant de découvrir
les livres de Jim Hrisoulas. Apres avoir lu plusieurs fois "
The Complete Bladesmith " le virus était bien installé
et je suis parti à la recherche du minimum nécessaire
pour me lancer dans l'approfondissement de mes connaissances livresques
par l'expérience concrète. Par chance je dispose
d'un peu d'espace ce qui m'a permis d'installer une petite forge
à main, une enclume, un établi avec un étau
de forgeron et les petits outillages indispensables.
Le
début de l'apprentissage
Avant
de m'essayer avec la fabrication du damas j'ai dû apprendre
les techniques de base du forgeage et s'il est bien connu que
c'est en forgeant que l'on devient forgeron je ne crois pas que
cela soit suffisant, il faut bien sur forger mais aussi analyser
les résultats sans faire de concessions, essayer de comprendre
ce qui c'est passé et en tirer des leçons pour la
suite. Quel dur chemin d'humilité...mais aussi que de plaisir
lorsque l'on peut enregistrer quelques progrès.
Le
damas cable
Lorsque
j'ai pensé avoir assez de maîtrise du forgeage et
de la soudure à la forge pour aborder le damas, j'ai décidé
de commencer par le damas câble car la synthèse de
mes lectures me le faisait apparaître comme sans doute le
plus simple à réaliser. Je me suis procuré
quelques bouts de câble neuf, câble pour élingues
et câble d'ascenseur, et en suivant à la lettre les
recommandations de Jim Hrisoulas j'ai eu la joie d'entendre sous
le marteau la prise de la soudure et la satisfaction de voir apparaître
un beau dessin après avoir nettoyé un petit bout
de métal sortant d'un bocal d'acide. La première
expérience fut très gratifiante.
Les
suivantes un peu moins car l'impatience aidant j'ai cherché
à économiser du temps donc à "améliorer"
la méthode préconisée par Jim Hrisoulas.
Les résultats ne furent pas à la hauteur de mes
espérences et j'ai dû revenir rapidement à
une stricte application de ses recommandations. Au cours de cette
période j'ai aussi été profondément
influencé par la lecture d'un article écrit par
Henri Viallon qui après un plaidoyer pour les lames forgées
écrivait entre autre " Le novice qui met une barre
d'acier dans le feu et la martyrise à coups de marteau
ne forge pas mais pratique l'empirisme et risque d'occasionner
bien des dégâts au lieu de lui donner ses lettres
de noblesse. " Cet article avait sans doute été
écrit pour moi. A bon entendeur...
Le
damas plus classique
Préparation
de la trousse
Actuellement,
tout en poursuivant mes expériences avec du câble,
j'expérimente le damas à partir de chaîne
et surtout le damas plus classique à partir de plats de
différent type d'acier. Voilà ma façon de
travailler. Ma forge est à charbon et pour réaliser
les soudures la plupart du temps j'utilise du charbon de bois
que je calibre afin de ne pas charger des morceaux trop gros et
avoir un feu bien régulier. Je commence avec 5 morceaux
d'acier. J'utilise deux pièces très carburées
(XC95) et 3 pièces d'acier mi-doux. Une des pièces
d'acier mi-doux longue d'environ 50 cm est placée au centre
et évitera l'usage des pinces de forge, je l'utilise comme
poignée. J'élimine toute la rouille et la calamine
à la lime (j'aimerai bien avoir une machine à bandes
abrasives... ), j'empile les barres avec les 2 plus carburées
à l'intérieur, les moins carburées à
l'extérieur. Je maintiens l'empilement avec au moins 3
attaches en fil de fer que je retire lorsque la soudure est prise.
Soudure
de la trousse, étirage
Je
place l'acier dans la forge et lorsqu'il est rouge cerise, je
l'enduis de borax et le replace dans la forge. Je surveille plus
le borax plus que la couleur de l'acier. Quand le borax est presque
blanc mais surtout quand il commence à se déplacer
à la surface de l'acier alors l'empilement est prêt
pour la soudure. Je réalise la soudure au marteau puis
une élongation toujours au marteau pour multiplier la longueur
initiale par deux (c'est l'opération la plus dure car il
faut travailler très vite afin de limiter le nombre de
chauffe ). Je coupe ensuite l'ensemble en son milieu, en laissant
assez d'épaisseur pour qu'après pliage les morceaux
restent assemblés. Ensuite je martèle les cotés
de l'assemblage sur les faces latérales pour épaissir
l'assemblage en son milieu et éviter d'emprisonner ultérieurement
de la calamine et du borax à l'intérieur de l'assemblage.
Pliage,
soudage et étirage
Avec
une brosse à fil d'acier je nettoie les surfaces, remets
en chauffe, plie la barre, mets du borax, replace l'ensemble dans
la forge pour une nouvelle soudure pour ensuite doubler la longueur
de l'empilement avant de le couper à mi-chair en son milieu.
Tout cela est à répéter autant de fois que
nécessaire pour obtenir 10, 20, 40, 80, 160, 320 couches
ou plus. Pour un couteau je pense que de 300 à 600 couches
sont suffisantes. Pour le moment je ne cherche pas à créer
des motifs, je cherche à maîtriser la technique de
base, celle de la création des couches presque parallèles.
Notes
sur le forgeage du damas câble :
1-
Il est très important de resserrer fortement les spires
du cable avant et pendant les opérations de soudage.
2-
Pour obtenir les plus beaux motifs, il faut étirer la barre
dans le sens de la longueur et celui de la largeur.
Notes
sur le forgeage du damas en couches parallèles :
1-
En ajoutant 2 ou 3 barres de 12NC16 les contrastes du motif seront
beaucoup plus important après la révélation
à l'acide (j'utilise du perchlorure de fer)
2-
Je ne cherche plus à obtenir beaucoup de couches, pour
débuter je pense qu'il vaut mieux rester entre 100 et 200
Les
premiers résultats sont encourageants....la suite à
la prochaine mise à jour.
Merci
d'avoir pris le temps de lire ce long texte. Si vous avez des
commentaires, des remarques ou des conseils à me donner
je les recevrai avec plaisir.
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