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Le damas ? / Histoire / Faux Damas

Le faux damas

Publié en 1895 le texte ci-après a été écrit pour défendre le véritable acier damas des imitations.

Ce texte en Anglais, Allemand et Français est de l'Union des fabriquants de canons de fusils de la Vallée de Vesdre, Province de Liège en Belgique.

Mise à jour 29 octobre 2001

( Note G.E. : J'ai essayé de respecter au mieux orthographe et typographie de 1895)

 

PREFACE

S'il est une industrie qui soit généralement peu connue du consommateur, c'est bien celle de la fabrication des canons de fusil en véritable damas.

Aussi la concurrence s'est-elle emparée de cette ignorance pour exploiter facilement la contrefaçon en substituant par un procédé ingénieux le faux damas au véritable.

C'est dans le but de mettre le public à l'abri de cette duperie que l'Union des fabricants de canons prend la liberté de vous adresser la brochure ci-jointe et la copie textuelle de la requête adressée au Gouvernement afin d'obtenir des mesures répressives.

La grande vogue dont le canon en damas pour fusils de chasse, n'a cessé de jouir depuis de si longues années, lui a valu dernièrement l'honneur d'un nouvel assaut de la part des Fabricants de canons acier. Les différentes expositions internationales et hier encore celle d'Anvers, ont déjà proclamé à suffisance l'indiscutable supériorité du canon en damas.

Qu'il soit permis cependant à l'Union des Fabricants de canons de la vallée de la Vesdre de faire connaître les causes de cette supériorité, causes tellement nombreuses et convaincantes que, quelque soit le progrès dont se targue le canon en acier, il ne peut légitimement espérer rivaliser jamais avec le canon en damas.

Les matières premières, fer et acier, devant servir à la fabrication de canons en damas, sont toujours de bonne qualité. Ces matières par un mélange raisonné de fer et acier composent une masse ou paquet dont la section mesure de 14 à 16 cent. []. Ce paquet passe une première fois au laminoir et en sort corroyé à 40 m/m []. La barre ainsi obtenue est alors découpée à billettes d'une longueur déterminée qui sont remises au four et passées à nouveau au laminoir pour en sortir à 6 ou 7 m/m carrés. Ces baguettes sont alors chauffées à blanc et tordues, puis assemblées et soudées au marteau par groupe de 2-3-4-6 baguettes selon la finesse de damas que l'on veut obtenir. Ces baguettes sont alors martelées pour arriver à une bande ou ruban de section 14 X 4. Cette bande est ensuite enroulée en spirale sur un mandrin. De là, on passe à la forge où l'ouvrier soude au marteau et un à un tous les joints de la spirale par une série de trois chaudes pour chaque joint. C'est après ce travail seulement que l'on a l'ébauche du canon. Pour en arrivée là, la matière a été laminée à deux reprises et travaillée deux fois au marteau. Inutile d'ajouter qu'après un tel travail cette matière a acquis une élasticité, une ténacité et compacité sans précédent. Dans le canon en damas la matière ainsi travaillée est non seulement excellente, mais employée de façon à obtenir la plus grande résistance.

En effet sur un canon de fusil, c'est la section transversale qui souffre le plus et dans les canons en damas par suite de l'enroulement en spirale, la section du canon correspond ou à peu près à la section longitudinale de la bande ou ruban, autrement dit, la section la plus fatiguée correspond à la section la plus résistante. Tout canon de fusil ayant été éprouvé avec une charge double de celle que peut contenir la cartouche qu'emploie le chasseur, peut faire supposer l'impossibilité d'un accident ; néanmoins, parfois un canon crève dans les mains du chasseur. Cet accident ne se produit pas avec le canon en damas, car, grâce à cette ténacité et cette élasticité dont nous parlions tantôt, il peut supporter la vibration d'un nombre infini de coups tirés, tandis que le canon acier dont la matière n'a subi qu'une seule opération ne présente pas la même résistance et cède après un certain nombre de coups tirés, la section transversale perpendiculaire au laminage éclate et se brise comme verre ; principalement en hiver, ces accidents sont des plus fréquents.

Nous admettons volontiers que le canon acier convienne pour l'arme de guerre, laquelle demande un canon de forte épaisseur de métal, mais il ne pourra jamais remplacer le canon en damas pour fusil de chasse.

En effet, une condition essentielle du canon de fusil chasse est d'unir à une grande légèreté les qualités de résistance et d'élasticité. Ces qualités de résistance et d'élasticité sont précisément la résultante de la combinaison des parcelles de fer et d'acier disposées entre elles et travaillées d'une façon si soigneuse que le manque d'habileté de l'ouvrier ou les vices de la matière employée se révéleraient d'une façon apparente dans le dessin qui constitue le "damas". Quoi d'étonnant après cela si le canon en damas demeure sans rival sur les principaux marchés de l'ancien et du nouveau monde ? Quoi d'étonnant que Liège reste le fournisseur attitré de la France pour, les fusils et canons fins malgré St-Etienne, de l'Allemagne, de l'Angleterre, malgré Londres et Birmingham ? Car, c'est en vain que l'armurerie étrangère a tenté de fabriquer le canon damas, les résultats auxquels elle est arrivée n'ont que rehaussé la supériorité réellement incontestable des produits liégeois. L'insuccès des diverses tentatives faites à l'étranger s'explique facilement si l'on veut se rendre compte de la complexité de la fabrication du canon en damas et de l'importance de ce facteur que l'étranger est incapable de se procurer "l'habilité de l'ouvrier".

Étant purement manuelle, cette fabrication n'a pu jusqu'à ce jour trouver l'application de moyens mécaniques.

Cette impuissance à enlever à la Belgique ce monopole de fabrication a nécessairement suggéré à l'étranger la recherche d'une substitution aux canons en damas, d'autres produits imitateurs contre lesquels le chasseur doit être mis en garde.

Rien ne pouvait attester d'une façon plus éclatante la supériorité du canon en d'amas que la conduite de certains armuriers qui, par une concurrence aussi déloyale que trompeuse, écoulent leurs produits sous le couvert d'un faux damas, lequel consiste à affubler un vulgaire canon en fer ou en acier, d'une couche de vernis imitant le vrai damas par un dessin habilement combiné. D'autres concurrents plus loyaux et plus scrupuleux cherchent seulement à détrôner le canon en damas par le canon en acier.

S'inspirant de la vogue dont jouit l'acier dans la grande industrie sidérurgique, ils font une réclame pompeuse en faveur, de ce nouveau canon.

Après ce qui a été dit plus haut, nous n'hésitons pas à croire que cette tentative sera aussi vaine que les autres, elle ne servira qu'à affirmer plus hautement encore la qualité et la valeur de nos produits.

La sanction officielle que reçoivent nos canons en subissant les épreuves rigoureuses exigées par le Banc d'épreuves des armes à feu de Liège, institution de l'Etat Belge, vient confirmer éloquemment notre témoignage. Aussi, combien sont rares les accidents provenant de fusils de chasse pourvus de canons en vrai damas.

Au sujet du Banc d'épreuves, il convient de consacrer quelques mots à cette institution nationale dont la haute direction est confiée par le Gouvernement à un homme d'une exceptionnelle compétence en la matière, Monsieur Jules Polain, Ingénieur et Docteur en droit. Par ses vastes connaissances et son dévouement incessant, il a fait de cette institution un établisse unique en son genre, contribuant hautement par là à la renommée universelle de l'armurerie Belge.

Dans cet établissement entre par jour des milliers de canons en damas et en acier et l'on est étonné de voir combien est peu grand le déchet pour les premiers.

Rappelons de nouveau pour terminer ce qui fait la supériorité des canons en damas, c'est qu'avant de se rompre, ils indiquent toujours aux tireurs le danger par un gonflement, tandis que les canons en acier se brisent soudainement causant souvent des accidents très graves.

(S.) L'Union des Fabricants de canons de fusils
de la Vallée de la Vesdre
lez-Liége (Belgique).

 

 

A Messieurs les Président et Membres
de la Chambre des Représentants
à Bruxelles.

Messieurs,

Le Comité de l'Union des Fabricants de canons de la Vallée de la Vesdre, prend la respectueuse liberté de signaler à votre bienveillante attention la situation qui est faite à l'industrie armurière : La crise dont elle souffre devient de jour en jour plus intense. A Liège, la ville par excellence des armes à feu, et dans la banlieue, le travail devient de plus en plus rare, les salaires sont descendus à un prix dérisoire.

Quelles sont les causes de ce malaise général ? Elles sont multiples, et nous nous permettons de vous signaler les plus récentes :

1° Le protectionisme à outrance qui sévit dans tous les pays voisins ainsi qu'aux Etats-Unis menaçait de nous fermer tous les débouchés importants.

Pour prévenir cette éventualité, les Fabricants d'armes de Liége ont été poussés à produire des armes à des prix extrêmement bas. Pour y arriver, la réduction du salaire de tous les producteurs demeurant impuissante, il fallait atteindre la qualité même du produit. C'est ainsi qu'au canon en damas on a été amené à substituer le canon dit acier. Il serait oiseux de montrer la supériorité du canon damas sur le canon acier qui ; s'il peut convenir pour le fusil de guerre à forte épaisseur, est dangereux pour le fusil de chasse dont la légèreté constitue une qualité indispensable ; or, cette légèreté rend le canon acier inapte, à cause du manque d'élasticité de la matière employée, à résister aux vibrations produites par le tir répété.

Cette supériorité de canon damas est trop appréciée par les connaisseurs pour nous laisser émouvoir par la concurrence que vient nous faire le canon acier.

Aussi, Messieurs, n'aurions nous pas recours à votre haute action, s'il n'y avait pour notre industrie une seconde cause de ruine.

2° Pour que cette substitution du canon acier au canon damas ne se révélât point à l'acheteur inexpérimenté on a pris l'habitude dans les fabriques d'armes de Liège de revêtir ce canon acier d'un vernis et de produire à l'aide de procédés ingénieux un dessin ressemblant s'y m'éprendre à celui des canons en damas véritable, en ayant bien soin d'apposer sur la bande les noms des plus fins de nos damas, tels que : "Damas Bernard", "Damas Turc", "Damas Crollé", etc.

Il est nécessaire de dire ici que le canon en damas, grâce aux combinaisons variées de parcelles de fer et d'acier habilement mélangées et travaillées, fait ressortir, sous l'action de l'acide sulfurique, un beau dessin bien connu des chasseurs. Ce dessin transperce le canon d'outre en outre, et n'est nullement un simple vernis altérable comme celui dont on recouvre le canon acier.

Cette contrefaçon n'a pas seulement pour résultat de diminuer la production du canon damas véritable dont le prix est supérieur, mais encore d'endosser à celui-ci la responsabilité des nombreux accidents de chasse auxquels donne lieu le canon acier.

Il y a là pour l'Industrie canonnière de la Vallée de la Vesdre une cause de préjudice chaque jour plus considérable. D'une part, l'acheteur non initié est induit en erreur sur la qualité de la marchandise ; d'autre parti cette contrefaçon nuit singulièrement à la vente du damas véritable. Dans ces circonstances, la situation créée aux fabricants de canons et aux ouvriers armuriers de la Vallée de Vesdre est des plus critiques.

L'Union des Fabricants de canons a cru ne pouvoir mieux faire que de vous prier, Messieurs, de défendre par une loi efficace, une concurrence déloyale.

Il faut de toute nécessité que l'étranger sache la nature du produit qu'il achète, que les canons faux damas soient vendus comme tels, qu'on puisse à première vue discerner le vrai du faux damas.

Rien de plus simple d'ailleurs : de même que par la loi sur la falsification des denrées alimentaires, les négociants en beurre sont tenus de placer sur leur marchandise une étiquette permettant de distinguer le beurre de la margarine, l'Union des Fabricants de canons sollicite la confection d'une loi obligeant les Fabricants d'armes Liégeois de graver désormais sur les canons de fusil faux damas la mention : "Faux Damas" ou la traduction de la dite mention en langue du pays auquel le fusil est destiné.

Nous osons espérer, Messieurs, que le Parlement aura a honneur de contribuer dans la mesure de son possible, à relever l'industrie séculaire et essentiellement Belge des canons en damas.

Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'hommage de notre respectueuse considération.

L'Union des Fabricants de canons de la Vallée de la Vesdre
Liège (Belgique.)

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